La mort du « travailler plus pour gagner plus »
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Depuis la pandémie, nous sommes nombreux et nombreuses à réfléchir sur la nouvelle relation que les salariés ont avec leur travail. Force est de constater que les changements sont nombreux, et c’est pour cela que j’ai souhaité faire un sondage sur mon compte Linkedin. Le résultat de ce dernier m’a plutôt étonné à vrai dire, en tous cas, certains de ses éléments.
Il est peu surprenant qu’en ces temps de problématique de pouvoir d’achat, seulement 2% des 5 545 personnes ayant répondu souhaitent travailler moins pour gagner moins. Par contre, ce qui m’a vraiment surpris, c’est que 42% ait choisi la seule réponse qui ne parle pas d’argent et souhaitent juste vivre mieux leur vie personnelle.
Quand on ajoute ces 42% aux 46% qui souhaitent travailler mieux et gagner autant, cela fait tout de même 88% des personnes qui pensent avant toute chose à leur bien-être et à leur équilibre vie privée / vie professionnelle. Eh oui, le travailler plus pour gagner plus ne fait plus recette. Seuls 10% des répondants ont choisi cette réponse.
Est-ce si étonnant ? Pas vraiment, et en voici les raisons
1- Travailler plus… pour plus de mal-être ?
Je sais, je peux donner le sentiment de radoter, mais le niveau de mal-être au travail n’a jamais été aussi élevé dans nos sociétés, mais il y a une grande différence par rapport au siècle dernier : les salariés peuvent désormais agir.
Eh oui, le chômage de masse a disparu petit à petit donnant ainsi la possibilité aux salariés d’avoir le choix, que ce soit par le biais du quiet quitting et en ne travaillant pas plus que de nécessaire, ou en changeant de travail puisque le marché du travail est désormais dynamique.
Il est vraiment très intéressant qu’en cette période inflationniste et de questionnement sur le pouvoir d’achat, seuls 10% des répondants se déclarent prêts à travailler plus pour gagner plus alors qu’il n’y a pas si longtemps, un Président de la République s’est fait élire sur ce slogan ! L’argent n’est plus la seule motivation comme je l’expliquais dans mon article de la semaine dernière, et je trouve que c’est une excellente nouvelle, non ?
2- La valeur travail remise en question par la pandémie elle-même
Il ne faut pas oublier qu’une chose absolument incroyable s’est passée, au niveau mondial, avec la pandémie. Le monde que l’on décrit comme parfois horriblement cynique et violent dans son capitalisme a décidé de mettre à l’arrêt son économie pour préserver l’humain.
Pour la première fois dans l’histoire de l’économie moderne, nos dirigeants ont consciemment décidé, et exprimé, qu’une vie valait plus qu’un travail ! En France, nous avons eu « le quoi qu’il en coute », mais mis à part dans une moindre mesure le Brésil et les États-Unis, tous les pays ont préféré protéger la santé de leurs citoyens plutôt que leur économie et… vous savez quoi ? Ils ont aimé ça !
Nous avons découvert que la valeur travail n’est pas la première des valeurs comme beaucoup ont voulu nous le faire croire pendant des décennies. Le travail n’est qu’un moyen, pas une finalité et c’est pour cela que la première réponse faite au sondage, c’est de travailler mieux pour gagner autant. ; cela semble raisonnable comme demande tout de même !
Les salariés souhaitent trouver un bon équilibre vie pro/vie perso, ne pas être stressés au quotidien, ne pas faire de burn-out. Ce qui me semble fou, c’est que le « travailler mieux pour gagner autant » semble la plus simple des 4 réponses, et pourtant, nous entendons peu, pour ne pas dire aucun, discours politique reprenant cet item.
Oui, bien entendu, il y a eu beaucoup de commentaires me reprochant de ne pas avoir proposé la réponse « travailler moins pour gagner plus ». Si je ne l’ai pas fait, c’est surtout parce que n’importe quel être humain normalement constitué aurait choisi cette option et que ce qui m’intéressait, c’était vraiment un choix entre des réponses réalistes économiquement et politiquement, à très court terme.
3- Le travailler mieux ne veut pas dire produire moins
Et non, les salariés ne sont tout de même pas prêts à tout pour leur bien-être. Ils sont conscients que leur salaire est lié à ce qu’ils produisent et qu’un salaire n’est pas quelque chose qui tombe du ciel.
Cependant, ce dont ils sont conscients également, c’est qu’il y a une énorme différence entre dire « travailler moins » et travailler mieux », même si, très concrètement, les 2 peuvent être intimement liés.
L’expérience menée en Angleterre l’a bien montré. Une semaine de 4 jours avec 30/32 heures travaillées, n’a pas fait baisser la productivité, ni la rentabilité, au contraire.
Travailler mieux, c’est mettre un terme à ces réunions sans fin qui ne servent pas à grand-chose, c’est arrêter de considérer que l’implication d’un salarié se mesure au nombre d’heures passées au bureau, c’est admettre qu’un mail qui n’est pas envoyé à 19.00 peut très bien attendre le lendemain matin, ou qu’une réunion après 18.30 n’est pas la meilleure des idées.
Travailler mieux, c’est appliquer à l’échelle de l’entreprise ce que nous a appris la pandémie au niveau mondial : sans êtres humains en bonne santé… rien n’est possible.
CONCLUSION
Eh oui, notre monde a changé et les salariés ont changé avec lui. Ce qui me surprend parfois, ce sont ces dirigeant.e.s qui souhaitent revenir à l’ancien logiciel, celui du siècle dernier. Et ce qui m’inquiète, c’est que j’ai le sentiment qu’un grand nombre de nos dirigeants politiques n’ont pas compris ces changements et restent accrochés aux théories qui étaient en vogue avant la pandémie.
Mais je suis très, très optimiste car de façon plus évidente que jamais, le rapport de force entre les salariés et les employeurs est en train de s’inverser de façon radicale. Alors… comme dans tout mouvement de balancier, cela prendra du temps pour trouver un équilibre juste… mais n’en doutons pas, après une période de tension, tout se passera bien car, de vous à moi : nous n’avons pas d’autre choix que de faire en sorte que cela fonctionne.
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